C’est parti d’une envie de partage, d’une envie de faire ensemble.
Un jour Julie, une stagiaire éducatrice est venue me rencontrer au Bookkafé.
Elle se demandait si des jeunes en service accueil de jour pourraient venir en stage cuisine au café.
J’étais bien embêtée avec ça, je n’ai pas fait d’étude de cuisine, j’ai appris sur le tas, alors je préfère laisser la formation des jeunes à ceux qui savent.
Mais là, Julie a insisté et j’avais au fond de la tête une idée que je voulais essayer depuis le depuis du projet Bookkafé mais je n’avais pas encore osé.
J’avais lu un article sur un projet nommé « Les petites Cantines » .
Les Petites Cantines, c’est un réseau non lucratif de cantines de quartier, où les convives s'accueillent et se rencontrent au travers de repas durables, participatifs et à prix libre. Il s'appuie sur l'entraide et l'intelligence collective pour tisser des relations de qualité et contribuer à la construction d'une société fondée sur la confiance.
J’avais lu ça et je me suis dit que c’était une belle façon de rompre l’isolement, de recréer le lien.
On a constitué une équipe des gens d’univers différents, d’âges différents, un carnivore, des végétariens, une anti-endive, des amoureux des desserts, des qui jouent avec les ingrédients, des qui suivent les recettes au gramme près.
On s’est réuni et on a commencé à réfléchir, à penser repas partagés.
Comment on s’organise? Qu’est ce qu’on cuisine ?
Chacun a proposé sa recette coup de coeur. Soit une recette qu’il avait aimée, soit sa recette phare, celle qu’on réussit à coup sûr, qu’on maitrise.
On a décidé qu’on l’on cuisinerait tous ensemble, à 10, que l’on ouvrirait le repas à une vingtaine de personnes, et que chacun pourrait donner ce qu’il veut en contrepartie.
Soit une participation financière, soit un troc contre des fruits et des légumes.
On a établi un menu, et on a testé, ici que l’on soit chef ou débutant, on a tous suivi la personne qui a proposé la recette.
On a bu beaucoup de café à chaque fois et on a ri, beaucoup en préparant. On se retrouvait à 9h30 et on cuisinait jusque 12h en attendant nos « invités ». Puis ensemble on servait et on mangeait. A chaque fin de repas les invités partis, on débrieffait sur : ce que l’on avait cuisiné, si ça fonctionnait, si c’était bon, si les quantités étaient suffisantes, si on validait.
En démarrant ce projet, on avait juste l’idée d’essayer, voir si en réunissant des personnes très différentes ça prendrait.
On a démarré facile, c’est à dire, sans poser trop de questions, et puis on est monté en "level".
On a intégré tous ensemble la saisonnalité des produits, ce qui n’était pas évident pour tous au départ est devenu un réflexe.
Alors la moussaka (recette à base d’aubergine) l’hiver c’était non, à moins de transformer la couche d’aubergine en couche de courges.
On s’est mis à réinventer les recettes pour les adapter aux saisons ou aux événements.
Un jour les Manges quoi sont allés découvrir le glanage de mûres dans les petits chemins, alors faisons une Panna Cotta au coulis de mûres.
Nous avons appris à nous adapter, jusqu’au moment où ça a coincé. On a eu du mal à trouver des légumes locaux.
Très bien alors lançons un jardin !!!
Et on a commencé, avec Amandine (qui a créé la Maison d’Editions Vous êtes ici) qui a un jardin fantastique à Hermin.Elle nous a accueillis à bras ouverts dans son jardin. Et ça a été le laboratoire de toutes nos tentatives.
Tout d’abord, on a bu du café.
Beaucoup de café.
Des après-midis entières.
On a regardé les fleurs, on a adopté des poules, on a appris à amadouer le jardin.
On a fait des ateliers pour apprendre à construire des carrés potagers.
On en a fait en hauteur pour moins s’abimer le dos. (Il ne faut pas oublier que tous les Manges Quoi n’ont plus 20 ans)
On a réussi des trucs supers : les courges ouahhhh c’était magique !
On s’est bien foiré : la tour à patates n’a rien donné, mais on a essayé.
Le grand bonheur, ça a été de cuisiner ce qui avait poussé dans « notre » jardin, d’utiliser nos oeufs….
Se dire : je suis en train de faire une quiche aux petits pois d’Hermin.
Jardiner ça permet de prendre conscience aussi du temps que prennent les choses, regarder pousser son radis, c’est le savourer quand il sort de terre.
Jardiner ça ancre, ça pose, ça inscrit quelque chose en soi.
On a tenu ce projet malgré les années masquées, on se rejoignait au jardin, c’était une bulle d’air pour chacun d’entre nous, ça nous a permis de continuer à respirer.
On a commencé il y a presque 5 ans maintenant et enfin c’est l’heure de tout raconter.
On a écrit des livrets, on y a mis notre cœur, et puis on va les fabriquer en entier de nos mains.
Les cartons du coffret seront découpés et gravés à Lapugnoy chez indelab, les livrets seront imprimés en riso chez Amandine à Hermin, c’est Brunö atelier graphique qui a dessiné les illustrations, et Jérémie Bernaert qui est un photographe lillois qui nous a immortalisés en images.
On est heureux de pouvoir partager cette expérience, parce qu’elle est riche de rencontres, de douceurs, d’enseignements.
Parce que surtout, elle dit qu’il suffit de pas grand chose, qu’il suffit d’avoir envie pour essayer.
LE COFFRET : LES MANGES QUOI qui regroupe un livret recette - un livret cuisine - un carnet de photo de Jérémie Bernaert - des illustrations d’Anaïs Bruneau - des textes de Maggie Deleglise édité par la Maison d’Editions Vous êtes ici.